Curateur / Curatrice : Yvon Goossens et Nasrine Kheltent

Artistes : Benjamin Loyauté / Adam Masood

Scénographie : Nasrine Kheltent

Exposition « La lumière sur … »

06.05 au 30.05.2021

Une scénographie qui propose un voyage entre littérature et astronomie à travers l’observation du ciel dans les cultures byzantine, islamique et chrétienne.

Une proposition artistique pour découvrir une autre histoire de l’astronomie.

La Chambre Galerie accueille diverses activités liées à l’art et à la culture. Durant cette année 2020-2021 s’y déroulaient des formations à la citoyenneté pour les publics qui souhaitent acquérir la nationalité belge. Dans cet espace culturel de dialogue entre culture orientale et culture occidentale, je me suis interrogée à propos des savoirs qui nous rapprochent, en Europe, des cultures orientales. Avant de développer une idée précise, je me soucie de rechercher à travers la connaissance plusieurs façons de raconter une même histoire.

J’interroge différents point de vue et différentes sources. M’intéressant antérieurement à l’astronomie et principalement au développements technologiques, humains et esthétiques au cours de l’histoire, j’ai retrouvé un ensemble de traces racontant cette aventure humaine du point de vue oriental. Il est étonnant de constater qu’au sein une même époque émergent des idées en des lieux distants. J’ai opérer une sélection d’événements en m’alliant à des traductions ainsi qu’à des ouvrages et des artistes dont la qualité de transmission transcendent l’érudition littéraire.

Une lueur chétive hantait ce soir encore la stabilité du ciel.

Eclatée, fossile, pâle, Hubert Reeves appelle cette lumière « l’ailleurs » : le lieu où nous existons depuis le Big Bang.

Un lieu résiduel… Exister dans l’intention de regarder le paysage d’un ailleurs correspond d’une certaine manière à l’attitude d’une personne qui tournerait le dos à son lieu d’origine pour une aventure qui n’aurait ni début ni fin.

Le propre du philosophe qui s’enquiert d’une mission spatiale est de répondre à ces questions universelles : qui suis-je ? pourquoi suis-je là ? D’où viens-je ?

Ouvrir les yeux sur l’opacité du ciel, c’était comme exiger de soi-même de retrouver la mémoire.

L’exposition propose alors de mettre en relation la maison de la sagesse-créée par Abbu Amas El-Mâamun en 832à Bagdad –en apportant des références aux premiers textes arabes datant du 9ème siècle au 13ème siècle qui ont marqué l’histoire de l’astronomie par un élément technique, scientifique, économique, philosophique voir théologique. D’autres pièces plus récentes sont également exposées dont : la cosmologie de Dante à travers « La Divine Comédie» écrite au 15ème siècleainsi que, entre autre, un ouvrage rare datant du 17ème siècle qui m’est parvenu grâce à la rencontre de Benjamin Loyauté, un artiste contemporain dont la démarche est fort expérimentée dans le tisserand du passé et du présent.

Nasrine Kheltent

 

 

 

 

 

 

 

 

 

« La Divine Comédie enluminée » Dante

Traduit de l’italien par Alexandre Masseron

Mis en image par Jean-Luc Leguay, Editions Dervy, 2013.

Impression couleur 100 x 120 cm

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

ضوء على

La lumière sur…

Adam Masood & Nasrine Kheltent 

Fusain, papier feutré      

2021

« Kalimat » كلمات en arabe, signifie paroles. Les paroles d’Adam Masood, répondent, par leur poésie et leur déplacement tant physique, que poétique à la proposition de faire la lumière sur… 

عباس بن فرناس

(810-887)

Abbas Ibn Firnas introduisit dans le monde occidental la technique de coupe du cristal de roche et développa par ailleurs des procédures  d’alchimie pour créer des cristaux à partir de différents minéraux. Cela permit à l’Espagne de cesser d’exporter du quartz en Egypte pour y être découpé.

Dans le domaine des sciences, il fut le premier de toute la péninsule Ibérique, et probablement en Europe, à utiliser les tables astronomiques de Sindhind d’origine hindoue, qui, plus tard, se révélèrent essentielles dans le développement de la science européenne.

On le considère aussi comme le créateur des verres correcteurs.

الحسن بن الهيثم

(965-1040)

Ibn al-Haytam, scientifique  pluridisciplinaire, connu sous le nom de Alhazen en occident pour de nombreux domaines. Il s’est installé au Caire au début du XIe siècle, à l’invitation du calife fatimide Al Hakim. Ce dernier lui a trouvé une mission : réguler les crues du Nil. Mais après des années de recherche, le savant doit s’avouer vaincu. Il sait qu’il signe ainsi sa condamnation à mort. Pour échapper à son sort, Ibn-al-Haytam se fait passer pour fou. Se  refusant de tuer un homme malade, le calife l’assigne à résidence. La peine durera 11ans. Reclus, celui que les occidentaux nommeront Alhazen n’a qu’une chose à faire : travailler. La légende rapporte que c’est en observant la lumière filtrer un trou de la taille d’une fente d’épingle qu’il comprendra le fonctionnement de la vision. Dans sa chambre sombre, une image inversée se dessine sur le mur opposé. Le savant multiplie les expériences, développant le principe de la chambre noire. Il en déduit les lois de l’optique et rédige son livre de l’optique, dans lequel il réfute la thèse des anciens grecs qui pensaient que la lumière venaient de l’œil. Il remarque ainsi qu’elle se diffuse en ligne droite, identifie la persistance rétinienne….

 Celui-ci préconisait la vérification expérimentale des théories en vogue plutôt que la confiance en la spéculation et la philosophie naturelle – il était critique de Ptolémée. Dans son Traité de l’optique il écrit « Dans tout ce que nous faisons, notre but doit être objectif et non arbitraire, nous devons rechercher la vérité et non la confirmation de nos opinions ».

Ibn Firnas crater

photo Apollo10

1969

Impression N&B

50 x 50 cm

 Au-dessus d’un horizon que l’américain Eugene Cernan, dernier astronaute à avoir exploré la Lune, qualifiera de presque irréel, on voit ici la Terre se lever.

« Voyage vers l’instant zéro »

Ed. EPA-Hachette-Livre 2006

Photogravure : APS Chromostyle

100 x 120 cm

Manuscrit en arabe sur papier légèrement teinté, 51 feuillets, de 11 lignes par page écrite en naskh et nasta’liq à l’encre noire, mots significatifs et titres écrits à l’encre rouge. Signé et daté : 25e dhu el’Hijja 1094AH=14décembre 1683, Iran. 17×10 cm.

Baha’al-Din Muhammad b. Husain Al’-Amili était un érudit islamique chiite, philosophe, architecte, mathématicien, astronome et poète. Originaire de Baalbek, en Syrie Ottomane (aujourd’hui le Liban), il immigre dans son enfance en Iran avec le reste de sa famille. Il fut l’un des premiers astronomes du monde islamique à suggérer la possibilité du mouvement de la Terre avant la diffusion de la théorie de Copernic. Il est considéré comme l’un des principaux fondateurs de l’école de philosophie islamique à Ispahan.

Ce manuscrit daté de 1682-1883, peut être considéré comme une des premières copies de l’ouvrage puisqu’il n’a été écrit que soixante ans après la mort de l’auteur en 1622. Il existe quatre copies de cet ouvrage, dont la plus ancienne est datée de 1056H / 1646 J.-C. à la British Library, Londres.

Les bonbons roses de Benjamin Loyauté ont le goût rose, le parfum rose de Damas (DamasK Rose), ancien emblème de la Syrie. Au XIesiècle, Ibn Sîna (Avicienne) prônait déjà les vertus analgésiques et purifiante de l’eau de rose de Syrie et de l’huile de rose, décrite comme des remèdes efficaces pour renforcer la mémoire et l’esprit. Ces sucreries sont emballées dans une boîtes avec l’inscription dans une police contemporaine épurée : « louloupti©25gr ».

Louloupti est un nom original inventé que l’on pourrait qualifier d’ « hyperconisme », dit Benjamin Loyauté un -diminutif affectueux. Loulou est un surnom donné à des enfants (comme « chéri »), accolé au suffixe arabe pti soulignant la profondeur des liens émotionnels tissés entre les amants, des amis ou une mère à son enfant : le terme ainsi formé constitue une marque au nom plutôt exotique et dénué de sens. Une petite icône noire est imprimée plus bas sur la boîte, à côté de la mention « Laboratoire Benjamin Loyauté » : Les bonons ont la forme d’une amulette assyrienne ancestrale protégeant du mal et semblable aux idoles aux yeux (environ 3500 ans av. J.-C.) représentant Ishtar (l’une des personnification de la grande déesse ou Déesse Mère de la Méditerranée) découverte dans le Temple aux Yeux de Tell Brak en Syrie. Un petit objet dont la fonction n’a jamais réellement été décidée. « L’objet est spéculatif et et fictionnel, mais il est pourtant dans chaque mémoire assyrienne » explique Loyauté. La composition est soigneusement détaillée en dessous de la boîte : sucre, sirop de glucose, gélatine, arôme naturel, colorant : E19.

Les bonbons louloupti est offert gratuitement aux visiteurs. Benjamin Loyauté défini ces bonbons comme des « transmetteurs». Notre premier contact avec le monde se fait à travers la bouche et l’alimentation, bien avant la vue ; les bonbons comptent parmi les signifiants les plus évidents de la petite enfance et d’un état initial de bien-être. Tels de la nourriture pour l’âme, les bonbons louloupti sont un manifeste condensé d’ holophrases, appelant à plus d’attention, de soin, de bonheur, de soulagement, de guérison, de re-construction du passé, de culture, de proximité.

Ibn Firnas crater

photo Apollo10

1969

Impression N&B

50 x 50 cm

Planche d’astrologie – Al Sufi

Ed. 18ème siècle

14 planches dessinées par l’astrographe néerlandais, Wil Tirion, 2015

Impressions couleur 40×40 cm